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Il avait réuni une collection digne d'un musée...
Hommage au dernier tailleur de limes d'Arnay
La carte postale ci-dessus, qui représentait Pierre RENAUDIN, avait pour légende : Le dernier tailleur de limes à la main - 2007. Onze ans après, le 6 juillet, cet homme de bien passionné par l’histoire de sa ville nous quittait. Il y a peu de mois encore, il fréquentait nos archives départementales, où ses compétences d’ancien inspecteur des contributions indirectes lui rendaient aisées les recherches sur les propriétés bâties et leurs habitants.
Ses nombreuses études ont porté sur les apothicaires de 1500 à 2006, sur les auberges et cafés du XIXème et du
début du XXème siècle, sur les habitations de la place Bonaventure des Périers (maisons LOYDREAU, MICHOT, BOURGOGNE, café de la Place et café du Nord), de la rue César-Lavirotte (maison LAVIROTTE), et de la place du Craquelin (Le Salon de coiffure du Logis des Trois Roys). Il allait terminer l’histoire de la maison abritant aujourd’hui l’hôtel-restaurant Chez Camille et des habitations détruites en 1943, place Edouard-Herriot, pour permettre le passage de vedettes allemandes. Il se passionna aussi pour l’histoire de la manufacture de limes, râpes & outils (PROUTAT, MICHOT et THOMERET, puis THOMERET et CREUSVAUX, et enfin THOMERET) qui fit vivre tant d’Arnétois entre 1845 et 1956 : Pierre consacra 12 brochures traitant des techniques de fabrication des limes ou de l’usine arnétoise, car la limerie fut, durant trois générations, une histoire de famille chez les RENAUDIN:
Son grand-père Léonce-Alexandre (1850-1920), natif des Vosges, fut d’abord forgeron de limes aux forges de son village, puis fut embauché comme ouvrier à la limerie d’Arnay en 1873. C’est en 1903 qu’il s’installa à son compte au faubourg St-Jacques, comme fabricant et retailleur de limes. Son père Albert (1900-1973) signa en 1928 avec M.PROUTAT un contrat de 10 ans de chef de fabrication. Il créa en 1942, dans sa maison du 15 rue Saulnier, sa propre entreprise de fabricant et retailleur de limes et râpes, qui perdura jusqu’en 1960.
Pierre, né à Arnay en 1940, bien qu’ayant choisi une autre voie, ne cessa de cultiver le souvenir de ce passé industriel et familial, profitant de toutes les occasions qui lui étaient offertes pour le faire revivre, présentant ses collections dans des expositions où il faisait des démonstrations de taille de limes, donnant des conférences, publiant des brochures ou écrivant dans des revues spécialisées. En voici quelques exemples :
En 2007, il fit paraître un article sur la fabrication des limes dans La forge, revue de l’Association Française de Forge (AFF), de Paris. En janvier 2009, il donna à l’Académie des Sciences Arts et Belles Lettres de Dijon une conférence intitulée : Les tailleurs de limes d’Arnay-le-Duc, et la même année il refit cet exposé en Suisse. En 2014, l’Office de Tourisme du Pays d’Arnay présenta son exposition : La lime dans tous ses états. Mémoire d’une tradition industrielle. Il était présent aussi aux fêtes des métiers et du pain de Civry-en-Montagne, aux salons du livre de la Maison
Régionale des Arts de la Table, aux Estivales d’Arnay, et à bien d’autres manifestations encore à travers la France.
De plus, l’écrivain Ignacio CATALAN, qui avait connu Pierre sur les bancs de l’école primaire d’Arnay, avait publié en 2007 un livre intitulé Les tailleurs d’espérance, portant en sous-titre : Quand Arnay-le-Duc fabriquait des limes pour le monde entier… : roman touchant qui mettait en scène Léonce-Alexandre RENAUDIN et son fils, et où l’auteur adressait au petit-fils des remerciements, dont nous citons la fin: ’’Sans Pierre Renaudin, ce livre ne serait pas. Il m’en a donné l’idée et fourni les informations techniques ou d’ordre social. Qu’il trouve ici l’expression de mon estime pour ses travaux et tous mes remerciements pour l’aide irremplaçable qu’il m’a apportée ! ’’
Pierre avait récemment vendu la maison familiale d’Arnay. Mais il souhaitait que tout ce que contenait l’atelier paternel, pieusement conservé, four, machines à tailler et outils, ainsi que ses propres collections, tout demeure dans sa ville. Ses nombreux dossiers (environ 3m3 !) sont aujourd’hui entre les mains de son cousin germain Raymond THIERRY. Ce dernier saura reprendre le flambeau avec l’aide d’un fils du défunt.
Pierre a été enterré dans la sépulture familiale au cimetière d’Arnay. Au cours de cette émouvante cérémonie, M.THIERRY rappela quelques épisodes de sa vie : sa scolarité au collège Claude Guyot, son service militaire en Algérie, sa carrière professionnelle de Nuits-St-Georges à Dijon, en passant par Clermont-Ferrand et Besançon, son engagement sportif au service de la jeunesse, sa vie familiale avec deux fils et trois petits-enfants. M. CHAVE, maire de la ville, lui rendit aussi hommage, et l’on évoqua la création d’un musée qui présenterait ses collections, un souhait cher
à notre ami. Espérons que ce souhait pourra se concrétiser afin de mettre en lumière le passé industriel et artisanal de notre ville et d’exaucer le vœu de son historien.
Aux hommes et aux femmes de bonne volonté de poursuivre son œuvre…
Article écrit par Françoise Villaume
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